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Société. Préjugés, conséquences psychologiques... comment le racisme renforce les inégalités de santé

Société. Préjugés, conséquences psychologiques... comment le racisme renforce les inégalités de santé

Dans son rapport national paru ce mercredi sur le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, la Commission nationale consultative des droits de l’homme alerte sur les conséquences des préjugés et des discriminations sur la santé physique et mentale.

Le rapport annuel de la Commission nationale consultative des droits de l’homme dénonce des inégalités de santé entre les personnes blanches et les personnes racisées. Photo d'illustration Sipa/Syspeo

Le rapport annuel de la Commission nationale consultative des droits de l’homme dénonce des inégalités de santé entre les personnes blanches et les personnes racisées. Photo d'illustration Sipa/Syspeo

La situation s’améliore, mais reste préoccupante. Dans son rapport annuel paru ce mercredi sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) note que l’indice de tolérance des Français a progressé en 2024 par rapport à 2023, passant de 62/100 à 63/100. Comprendre : ils sont plus tolérants vis-à-vis des personnes noires, asiatiques, arabes, roms, musulmanes et juives, « malgré la diffusion de discours de défiance et de haine par certaines sphères politiques et médiatiques ». Pas de quoi crier victoire, selon la CNCDH, qui déplore que « certains préjugés restent largement partagés » et « certaines minorités continuent d’être mises à part dans la société française ».

“Syndrome méditerranéen”

Cette année, le rapport - publié annuellement depuis 1990 - alerte tout particulièrement sur les risques que fait courir le racisme pour la santé des personnes victimes de discriminations. Une étude de 2024, réalisée auprès de plus de 1 500 médecins urgentistes à qui l’on a présenté des photos de personnes associées à des cas cliniques, a montré qu’à symptômes graves similaires, une personne noire avait moins de chance d’être classée “en urgence” par les médecins qu’une personne blanche. Et donc moins de chance d’être prise en charge rapidement, et d’être soignée correctement.

« C’est un biais des médecins, inconscient la plupart du temps, lié au “syndrome méditerranéen” », nous explique Claire Lallemand, coordinatrice du rapport. « C’est l’idée selon laquelle les personnes noires ou d’Afrique du Nord auraient tendance à exagérer leurs douleurs. Donc lorsqu’elles viennent aux urgences, leurs symptômes sont jugés moins crédibles que ceux d’une personne blanche. Ça s’inscrit dans un continuum historique raciste lié à l’esclavage, selon lequel les personnes noires étaient plus résistantes », décrit-elle, précisant que ce “syndrome” a été enseigné dans les facs de médecine jusqu’aux années 1960-1970. Avec, à la clé, des retards, voire des absences de diagnostics, et des conséquences graves sur la santé.

Pour les femmes noires, c’est la double peine, souligne la CNCDH. Elles ont 50 % de chance en moins d’être évaluées en “urgence vitale” qu’un homme blanc, selon l’étude parue en 2024. Ce qui peut aboutir à des situations dramatiques, indique le rapport, qui donne pour exemple la mort en 2017 de Naomi Musenga, dont l’appel n’avait pas été pris au sérieux par le Samu.

Les femmes noires sont également touchées par des biais racistes lors de leur accouchement, pointe le rapport. « Là aussi, c’est documenté et lié à des vieux préjugés selon lesquels les femmes noires exagéreraient leur douleur alors qu’elles ont l’habitude d’accoucher », détaille Claire Lallemand. Elle précise : « Les femmes d’ascendances méditerranéennes et africaines subissent plus de césariennes en urgence que les femmes blanches, car elles sont moins prises en charge médicalement avant, en raison des stéréotypes. »

Former les médecins

Le rapport indique, études à l’appui, que le racisme peut aussi avoir des conséquences psychologiques importantes sur les personnes victimes. Et ce dès le plus jeune âge. « Les blagues, les moqueries… Toutes ces micro-agressions peuvent être à l’origine de stress, de dépression, et provoquer jusqu’à des comportements addictifs - drogue, alcool - chez les adolescents », note Claire Lallemand. « Et c’est un angle mort : lorsqu’un enfant ne va pas bien, on ne va pas penser au racisme. On va chercher ailleurs, chez la famille, dans les résultats scolaires… »

La CNCDH estime qu’une sensibilisation des personnels soignants reste la clé pour lutter contre ces stéréotypes raciaux. Car pour l’heure, les discriminations raciales que peuvent pratiquer les médecins ne sont pas abordées dans les programmes des étudiants en médecine. Seules quelques formations pilotes sur le sujet existent, notamment à la Sorbonne, à Paris.

Des chiffres alarmants

Malgré une tolérance en progression au sein de la société française, le baromètre de la Commission nationale consultative des droits de l’homme donne des chiffres alarmants sur les nombreuses discriminations encore subies par les minorités ethniques et religieuses en France. Ainsi, en 2024, 60 % des Français estimaient que « de nombreux immigrés viennent en France uniquement pour profiter de la protection sociale », et 46 % pensaient que « l’immigration est la principale cause d’insécurité ».

Les Roms sont la minorité la moins acceptée, d’après le rapport, vus par 59 % des Français comme un groupe à part. L’antisémitisme, s’il est moins prégnant qu’en 2023, reste ancré, avec 36 % des Français qui jugent que « les juifs ont un rapport particulier à l’argent ». Et là où 1,2 million de personnes disent être chaque année victimes d’au moins une atteinte à caractère raciste, antisémite ou xénophobe, 97 % ne portent pas plainte…

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